Journal de bord n°3, Marine, Gentilly

Mardi 7 avril 2020, 10h40

L’inversion de la courbe 

Nous entamons aujourd’hui notre quatrième semaine de confinement en France. Depuis deux jours, un vent de bonnes nouvelles se répand dans les médias, appuyées sur des courbes qui semblent avoir entamé une inflexion tant espérée. « Depuis le 1er avril, le nombre de nouveaux lits nécessaires chaque jour est un peu moins élevé que la veille. », pouvait-on lire dimanche 5 avril dans Les Échos. Ces courbes, ce sont donc celles des admissions en réanimation dans les hôpitaux français, mais aussi italiens et espagnols. Néanmoins, les messages appelant à la prudence et au maintien des gestes barrières et du confinement reprennent de la vigueur. Il s’agit de ne pas se réjouir trop vite. D’autant qu’au Royaume-Uni, aux États-Unis et dans tant d’autres pays, l’évolution de la crise sanitaire ne prend pas exactement le même chemin. Pas pour l’instant. 

Rendez-vous avec mon écran

Dans l’appartement que j’occupe avec mon compagnon, nous avons succombé à certains rituels nés avec le confinement. C’est le cas du – désormais commun – « skypéro », entendons ici un rendez-vous pour un apéritif par le biais de la visio-conférence. Nous préparons désormais un verre et sortons le mélange de noix grillées et salées avant de se connecter avec familles et amis. Pas de quart d’heure de retard dans ces conditions, comme s’il nous semblait désormais plus malvenu que d’ordinaire de faire attendre les autres. On parle du confinement, de l’évolution de la crise, du télétravail, des occupations quotidiennes de chacun. Parfois, ces rendez-vous réunissent plus d’une quinzaine de personnes. La communication est alors une gymnastique que nous avons du mal à maîtriser. Il faut anticiper la prise de parole des autres, désigner nommément celui ou celle à qui s’adresse notre question et éviter toute source de bruits extérieurs, ce qui devient compliqué lorsque les enfants en bas âge monopolisent le micro. Ces rendez-vous sont finalement révélateurs des personnalités de chacun et exacerbent les différences de tempéraments. Les plus extravertis monopolisent la parole tandis que les personnes les plus réservées s’effacent, non pas à l’image, mais dans la présence discursive. En comparaison des rendez-vous habituels qui nous offraient l’occasion de nous retrouver physiquement, cette situation ne permet pas d’engager une conversation avec son voisin, de manière plus discrète que la prise de parole face au groupe dans son entier. Je remarque ainsi que les personnes les plus introverties sont, dans ce contexte, enfermées dans un rôle de spectateur qui, à de rares moments, se voit bousculé par une question qui leur est, soudain, directement adressée. 

Survivance des projets

D’autres rituels ne nous ont pas encore touchés, comme celui du pain fait maison, qui semble séduire nombre de nos contemporains confinés. À ce sujet, le journal 20 Minutes s’interrogeait le 31 mars dernier : « Pourquoi tant de monde se met à faire du pain (et à en parler) ? ». Je continue à cuisiner comme je le faisais le reste de l’année. Finalement, il ne me semble pas avoir acquis de nouvelles habitudes. Par exemple, je ne me suis pas mise à bricoler, à coudre ou à peindre. Peut-être que cela s’explique, en autre, par le fait que je ne dispose pas du matériel adéquat pour ce genre d’activité et qu’il m’est impossible de m’en procurer dans les commerces ouverts près de chez moi. Mais aussi, je ne pense pas disposer de beaucoup plus de temps que d’habitude : mes journées sont bien remplies par le travail. Nos activités de loisirs n’ont pas disparus mais ont changé de forme pour s’adapter aux conditions du confinement. L’entraînement de course à pied s’est transformée en séance de corde à sauter et en quelques tours du pâté d’immeubles. Aussi, nous avons entrepris, avec mon compagnon, de passer nos week-end à trier nos affaires dans l’appartement. Cette dernière occupation semble nous faire du bien à tous les deux. Elle va, en effet, dans le sens de notre projet de départ de Paris, puisqu’elle devrait faciliter notre prochain déménagement. Trier nos affaires et ne garder que l’essentiel nous engage déjà dans ce départ à l’étranger auquel nous pensons depuis plus d’un an et facilite quelque peu notre résilience quant à l’impossibilité de le voir se concrétiser à court terme. 

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