The bet of the easter Làmb (petite fable épistémologique en français facile, pidjin prussien et wolof profond), épisode 1 : The rumble in the jungle. Saskia Cousin et Mamadou Dieng

Episode 1 : The rumble in the jungle

C’est l’histoire du combat entre Karl et Paulo. Cela se passe aux environs de Pâques, dans l’arène confinée d’un pays périphérique. Le stade est presque vide, mais c’est retransmis en direct dans le monde entier. Est-ce juste un show de catch de plus, du MMA, ou autre chose encore ? On dit que c’est un combat à la vie et à la mort. Ce n’est pas la première fois que les deux écuries s’affrontent : la bataille se joue et se rejoue sur tout les continents, depuis des semaines, des mois et des années, des siècles plutôt. Ces derniers temps, c’est plutôt l’équipe de Karl qui gagne. Enfin, c’est ce qui se dit. C’est un combat méthodologique et méthodique, dans lequel chaque adversaire est soutenu par des milliers de supporters, et par de nombreux mécènes, plus ou moins officiels, plus ou moins fréquentables.

Nos héros s’échauffent en coulisse. C’est un combat à la vie à la mort. Pas leur vie à eux, ce n’est pas hunger games, tout de même ! Enfin, pas en théorie, ou en tous les cas, de plus en plus rarement – on raconte que certains ont fini au bûcher, mais c’était il y a longtemps. En fait, aujourd’hui, c’est bien plus intéressant : c’est un combat à la vie à la mort des spectateurs. Le principe est simple : le gagnant décide comment va vivre ou mourir la foule qui regarde. Comme chacun est persuadé qu’il peut seul sauver le monde, et que tout le monde est concerné, il y a une magnifique audience !

Bon, en réalité, ce n’est pas la première fois que les combattants disposent de ce pouvoir exorbitant, c’est même souvent le cas. Ce qui est nouveau, c’est que les spectateurs sont au courant. Par conséquent, des centaines de milliers de gens discutent, débattent, s’invectivent au sujet de ce combat. Parmi eux, les supporters convaincus et fidèles à l’un ou l’autre des combattants ne sont qu’une petite minorité. Les autres sont indécis. Cela aussi c’est intéressant. Autre caractéristique nouvelle : il n’y a pas ou plus d’arbitre. Ce sont donc les téléspectateurs qui arbitrent, enfin c’est ce qu’ils croient, ou voudraient croire. En fait, ils n’arbitrent pas, ils parient.

Donc chacun des spectateurs est devant sa TV FaceBouc et parie. Ce qui est spécial aussi, c’est que les paris influencent directement le combat en attribuant ou en retirant des points aux combattants, en direct et dès leur arrivée dans leurs loges, selon les coups portés, mais aussi les préparations, les déclarations, les célébrations.  C’est bien un arbitrage, ces paris ! C’est important pour le moral et la force mentale des combattants, mais aussi pour les mécènes qui peuvent juger en direct s’il ne vaut pas mieux « changer de cheval » en cours de match. Bien sur, a priori, c’est bizarre, c’est injuste, ce combat qui ne se joue pas seulement sur les forces des battants, mais fluctue selon les arbitrages /paris des téléspectateurs commentateurs devant leur TV. Mais finalement, est-ce que ce n’est pas juste que les gens aient leur mot à dire sur le héros qui va décider de leur vie ou de leur mort ? 

Pour les aider à arbitrer, ou à parier, il a deux animateurs-commentateurs : Gaston Kovid et Imre Viral. En fait d’animateurs, on devrait plutôt parler de griots, chacun acquis à l’un des combattants. Selon celui que l’on écoute et selon l’angle des caméras, tout aussi partiales, on n’entend ni ne voit pas du tout, mais alors pas du tout, le même combat. C’est donc bien un pari, cet arbitrage.

Revenons à la description de cette arène presque vide d’un pays périphérique. Il y a donc les combattants, les 2 commentateurs sportifs, quelques VIP – des grands du monde ou des sponsors -, les caméras, et l’audience.

Commençons par les combattants. Karl est une bête de combat, créature issue de la méthode OHERIC et fighter capable de s’infliger les entrainements masochistes de son coach et mécène Schwan Schwarzer. Certaines allégations stipulent qu’il se dope au bigpharma. Méchantes rumeurs, que ni Karl ni Schwan ne commentent, suivant ainsi leur ligne de conduite : avare en paroles, systématique dans les coups.

Paulo, lui, c’est un peu l’antithèse de Karl. Paulo, il s’entraîne sur la plage quand il a envie, il a changé 1000 fois d’entraineurs, ne les écoute jamais que d’une oreille. Quand il combat, il s’en remet à ce que lui dicte la forme d’une vague, le chatoiement d’un rayon de soleil, le souffle d’un djinn.  Sa méthode, c’est « tout est bon », et « l’imagination au pouvoir ». À priori, d’expériences, ceci paraît moins efficace ou productif que l’entrainement intensif de son adversaire. Ce n’est pas les amulettes dont il se barde et le sirop de nivaquine dont il s’enduit qui améliorent sa côte dans les paris. Ni ses chances de se refaire après le Ko que lui a infligé Karl au dernier match. Mais c’est a priori : car qui peut prédire l’avenir ?

Les combattants vont monter sur le ring. Le flegme de Paulo étonne. Dans les loges, Imre lui penche le micro pour recueillir quelques mots avant le combat – il faut bien conforter le paradigme Paulo, et faire frémir les parieurs qui ne sont pas vraiment de son coté ce soir : « Pour ce combat, j’ai lutté avec les alligators. Je me suis battu avec une baleine. J’ai mis les menottes à un éclair, j’ai jeté le tonnerre en prison. Vous savez, je suis mauvais. J’ai tué un rocher, blessé une pierre, envoyé une brique à l’hôpital. Je suis si méchant que je rends la médecine malade ! Je suis si rapide que je peux traverser un ouragan sans me mouiller. Quand il me verra, Karl paiera sa dette. Je peux noyer une gorgée d’eau et tuer un arbre mort. Attendez, et vous verrez Paulo l’artiste ! ».

Dans les loges VIP, une pangoline et 3 chauves souris se congratulent en grignotant des Matsutake : « Noyer une gorgée d’eau, tuer un arbre mort » ! !! Leur poulain Paulo a l’air plutôt en forme. Un peu fanfaron, c’est irritant, un peu désordonné, c’est fatiguant, mais ça fait partie de sa force : cela le rend imprévisible, contrairement à l’autre méthodologue. Plusieurs sièges sont restés vides et nos VIP se moquent des deux principaux absents, les pseudos féroces américains alités dans leurs zoos respectifs. Bounty Lion a fait une overdose de kitkat et Tigrou Bronx s’est cassé la voix à force de rodomontades. L’absence de Gorilla fait mal au cœur en revanche. Elle n’a pas pu venir, bloquée pour une sombre histoire de visa. On lui envoie des selfies avec des petits cœurs.

Tiens, c’est au tour de Karl de causer dans le micro que lui tend Gaston : « L’empirisme est un donjon étroit et abject d’où l’esprit emprisonné ne peut s’échapper que sur les ailes d’une hypothèse ». « En toute objectivité, Karl nous éclaire de sa sobriété, il est la force normale », conclut le griot attitré. 

« ‘Normal ‘ ?, comment cela ‘normal’, nan mais pas du tout ! ce n’est pas du Karl ‘normal’ : il se prend pour le jeune Werther ce soir, ou quoi ?! C’est la révolution », ricane Pangoline. Elle lance à la cantonade : « fais gaffe, Karlito, Paulo, c’est ton Barbe bleue ! ».

Aïe, changement d’ambiance : les joyeux convives sont rejoints par Schwan Schwarzer, le mentor et mécène de Karl, confit dans son petit costard d’austère prédicateur gestionnaire – le genre évangélique. Il masque mal son complexe de supériorité. Figurez-vous que ce type se considère tellement extra-ordinaire, qu’il croit que son apparition éclipse tout ce qui précède et l’entoure. Personne n’ayant envie d’argumenter avec cet oiseau de malheur, chacun examine soigneusement son matsutake en attendant que cela commence.

Et puis c’est un peu l’angoisse : Paulo est toujours en mauvaise posture question paris. Tandis que les combattants s’échauffent, les télespectateurs ont droit à un résumé de sa vie, ses œuvres et ses maîtres. C’est le moment de la pause publicitaire.

Pour vous, cher téléspectateur, c’est le moment de parier . Alors Karl ou Paulo ? Et pourquoi donc ? On vous attend dans les commentaires !! Jam Rek

A venir : Episode 2 : Bakk to the futur

3 réflexions sur “The bet of the easter Làmb (petite fable épistémologique en français facile, pidjin prussien et wolof profond), épisode 1 : The rumble in the jungle. Saskia Cousin et Mamadou Dieng”

  1. Très beau tableau… Beaucoup d’informations à grignoter via les références du monde actuel représentées à travers toutes ces différentes figures. Karl ou Paulo? Bonne question. Paulo, se rapproche au mieux de l’Homme tandis que Karl d’une machine, d’un algorithme façonné pour produire le résultat. Mais peut on réellement faire un choix? Chacun d’eux porte les germes de ses propres limites… Alors, On peut choisir de ne pas choisir et surtout de ne pas devenir des facebouc »euros » tant que le gorille n’a pas eu de visa !!!😉😉

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    1. Paulo du haut de ses hauts faits de guerre mérite la corona de l’horreur bien serrée sur sa tignace épineuse sa force sur les éléments de tellurisme fout la pétoche aux éléments de la vie. Je pense qu’ il aura fort à faire face à Karl quifort inspiré de ses théories de psychologie analytique reste inébranlé.Je n’ose pas parier mais ce combatsera un régal. D »ailleurs ce sont les spectateurs qui l’ont réclamé. Ñaari mbër yii làmb a leen boole. Merci pour ce beau texte le rapport discours/image est tout simplement exquis. Chapeau Président.

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